vendredi 24 janvier 2014

Le Vent se lève : pourtant, que la montagne est belle ...



Testament d’une carrière désormais derrière lui, Le Vent se lève d’Hayao Miyazaki est un film à  la virtuosité esthétique constante mais à l’intérêt étrangement plus inégal, du moins lorsque l’on n’est pas spécialement amateur de film d’animation comme c’est mon cas. Un travers qui n’empêche cela dit pas l’œuvre d’Hayao Miyazaki de se clore superbement, rachetant ainsi en grande partie deux heures pas toujours inoubliables. 


Peu coutumier des films d’animation, appellation selon moi uniquement créée pour permettre à des adultes d’aller voir des dessins animés sans se sentir ridicules, j’ai longtemps eu peur que Le Vent se lève m’indiffère à peu près autant qu’un banal Walt Disney, loin du chef d’œuvre promis par maintes critiques pleurant la retraite de leur idole.

D’une beauté visuelle indéniable et très joliment ponctué par un thème musical splendide, qui m’avait à lui seul convaincu de me rendre en salle grâce à la bande annonce, Le Vent se lève m’a ainsi longtemps paru être un dessin animé certes fichtrement bien foutu mais pas beaucoup plus intéressant qu’un dessin animé justement. Gentillet mais bien caricatural voire simplet pendant une grosse heure, Le Vent se lève me semblait alors être à des années lumières du petit bijou de sensibilité auquel je m’attendais plus ou moins, le peu de profondeur psychologique de l’ensemble rendant difficile toute véritable émotion.

Ou alors j’étais donc un monstre froid, incapable du moindre sentiment ou de la plus microscopique compassion. Soit, il en était donc déjà fini de ma récente bonne résolution de m’ouvrir à l’inconnu et de laisser mon cœur être pénétré de toute la beauté du monde. Il faut parfois se résoudre à être ce que l’on est, et pas plus.

Au bout d’une heure et demie d’un relatif ennui entrecoupé de quelques sourires et de quelques petits frissons provoqués par la magnifique rengaine musicale ponctuant chaque moment clé de la romance des deux jeunes héros du film je me retrouvais donc face à une triste réalité : les films d’animation ne sont pas pour moi, et me voilà bien emmerdé pour écrire une chronique avec ça.

Et soudain, alors que je n’attendais à peu près plus rien de ce moment très anodin, Hayao Miyazaki sembla se souvenir qu’il avait assez pris son temps et qu’il était temps de mettre enfin sa virtuosité au service d’une noble cause pour clôturer en beauté une des œuvres les plus remarquables du cinéma contemporain.

Le miracle advint alors. Convoquant la touche dramatique et surtout humaine qui manquait jusque-là cruellement à son film, Hayao Miyazaki fait en effet du final du Vent se lève un vrai moment de poésie, d’une tristesse bouleversante de simplicité et de beauté, toute en pudeur. Jusqu’ici relativement vaine, la splendeur de ses images éclate alors complètement au grand jour et permet toujours à l’aide d’une atmosphère musicale d’une élégance rare de donner au Vent se lève toute la profondeur auquel il semblait aspirer dès ses débuts, avec la fameuse citation en français dans le texte de la phrase de Paul Valéry « Le vent se lève ! … il faut tenter de vivre ! ».

Longtemps un peu risible, cette ambition philosophique prend ainsi tout son sens dans des derniers instants où toutes les pièces du puzzle se mettent en place pour donner à ce final des allures d’épitaphe artistique et philosophique pour Hayao Miyazaki. Libérée de la trivialité enfantine qui l’a longtemps entravé, cette belle histoire d’amour et d’obsession des cieux révèle enfin sa singulière beauté et son humaine complexité, permettant au vieux maître de clore son œuvre sur une note de poésie déchirante d’émotion, d’une de ces poésies sur lesquels il est difficile de mettre des mots tant elle semble appartenir à un bien lointain ailleurs. Et le tour est finalement joué. C'était le dernier.

Fin.



Note : 8 (Barème de notation)

Pour vous faire votre avis par vous-même : la bande annonce





A suivre : 12 Years A Slave

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire